« Lorsque je regardais la télé, je tombais sur des débats dont les étrangers ou musulmans par exemple font l’objet, et évidemment aucune personne concernée n’était autour de la table. Je me demandais: pourquoi ces gens parlent-ils à ma place ? Je ne me suis pas engagé pour parler à la place des autres, mais pour que les autres ne parlent pas à ma place». L’engagement de Matar Diop, 46 ans, lui est chevillé au corps depuis son enfance. Fils d’une fratrie de 8 enfants et nés de parents paysans, il grandit au Sénégal dans des conditions précaires au sein d’une famille défavorisée.
Son parcours scolaire témoigne de cette précarité. « Il n’y avait pas d’électricité dans le village où j’ai grandi, le soir nous faisions nos devoirs éclairés par la faible lumière produite par une lampe-tempête ».
Au collège, il débute son engagement militant en tant que délégué, puis au lycée il rejoint l’Union Nationale des Elèves du Sénégal, syndicat regroupant l’ensemble des représentants des lycées de son pays. Il participe à cette occasion à des grèves dont les revendications portaient essentiellement sur le manque de matériel pédagogique dans les classes et médical dans les infirmeries.
Il débute son parcours universitaire à Dakar, dans le domaine de la physique-chimie, puis poursuit ses études à son arrivée en France en 2001 dans le domaine de l’informatique, dans laquelle il avait de l’intérêt. « Les filières de l’informatique n’étaient pas très développées au Sénégal à l’époque, ce n’était pas le cas en France où j’ai pu m’inscrire facilement ». Ses études le mènent dans un premier temps à Metz puis à Toulouse, et plus tard il s’établit en Île-de-France où il trouve du travail.
Entouré par ses amis sénégalais, Matar doit aussi compter sur sa détermination et son courage pour poursuivre ses études dignement. Il devra enchaîner les petits boulots dans la restauration, la sécurité, les travaux saisonniers et l’intérim pour subvenir à ses besoins. Il travaille le soir, la nuit, et les week-ends, tout en concluant un Master Professionnel. C’est dans ce contexte qu’il souhaite la mise en place d’un revenu minimum universel, après avoir vécu la difficile tâche d’étudier et de subvenir à ses besoins.
En 2004, il commence à travailler dans des petites entreprises, des plus grandes, avant de se lancer en indépendant récemment.
Son engagement politique débute en 2009 au sein du Parti Socialiste à Saint-Denis, où il vit jusqu’en 2013 avant de déménager à Noisy-le-Grand. D’abord sympathisant, puis militant, le socialisme, c’est ce qui lui a permis, au Sénégal, de pouvoir suivre des études dans une école de l’égalité des chances. Que l’on soit riche ou plus modeste, l’éducation était la même pour tout le monde. Son engagement prend tout son sens lors du quinquennat Sarkozy, où « Le climat politique en France, avec le débat sur l’identité nationale ou le discours de Grenoble, était nauséabond ».
Ses convictions ne sont remises en question par personne, et encore moins par ses camarades, qui le plébisciteront pour se présenter sur la liste des élections régionales conduite par Audrey Pulvar en 2021. Il n’hésite pas à s’engager, dans une liste conduite « par une femme de convictions, qui porte l’écologie et les valeurs de gauche au sein de la campagne ».
Matar sait d’avance qu’il militera toute sa vie pour ses idéaux : « Lutter contre l’injustice et les inégalités, la montée de l’extrême droite et sa banalisation dans les médias, améliorer la vie des gens ». Lors de la campagne des législatives, il n’a pas hésité à s’engager auprès de la NUPES et de son candidat Thomas Portes.
Marié et père de deux enfants, il cultive une passion toute particulière pour la littérature. Plusieurs manuscrits traînent dans ses tiroirs, et il finit par publier son premier roman. « Les trompettes de l’alternance » est publié début 2021 aux Éditions Publiwiz.
Si le temps lui manque pour se consacrer à d’écriture, il n’abandonne pas pour autant et pense un jour concrétiser ses projets.