M. Thomas Portes attire l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur les graves atteintes à la liberté de manifester subies par l’association La Libre Pensée 34 et le mouvement Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS), ainsi que d’autres organisations de solidarité avec le peuple palestinien et libanais, sous l’autorité du préfet du Hérault.
Depuis plus d’un an, des manifestations pacifiques se tiennent régulièrement en solidarité avec le peuple palestinien, visant à dénoncer les crimes et la situation humanitaire au Proche-Orient. Dès leurs débuts, ces rassemblements ont fait l’objet de tentatives d’interdiction, malgré leur caractère pacifique et leur respect de l’ordre public. Toutefois, les juridictions compétentes, par deux décisions du tribunal administratif, rendues en référé-liberté les 21 et 26 octobre 2023, ont annulé les effets de l’arrêté préfectoral, permettant ainsi à ces organisations d’exercer pleinement leurs droits jusqu’au 24 août 2024, sans qu’aucun incident ne soit à déplorer.
Or, depuis fin août, les associations se trouvent confrontées à une répression systématique menée par le préfet du Hérault. En réaction à l’incendie d’une synagogue à La Grande-Motte, ce dernier a utilisé cet évènement tragique pour établir un amalgame inacceptable entre cet acte criminel et les manifestations de soutien à la Palestine, insinuant une association injustifiée avec l’antisémitisme. Pourtant, il est avéré que les manifestations en question sont entièrement pacifistes, n’ont jamais comporté de discours haineux et qu’aucun lien n’existe entre les auteurs de l’incendie et les manifestants. Malgré cela, le préfet du Hérault s’est appuyé sur cet amalgame fallacieux pour prononcer à deux reprises l’interdiction des manifestations.
Depuis, il interdit systématiquement tout passage par la place de la Comédie et poursuit une politique de harcèlement, portant ainsi atteinte aux libertés fondamentales de réunion et de manifestation. Ces interdictions injustifiées constituent une violation manifeste des libertés publiques. De surcroît, il apparaît que les associations et leurs militants subissent une véritable campagne de harcèlement administratif et judiciaire, matérialisée par des convocations, des procès-verbaux injustifiés et des poursuites judiciaires. À titre d’exemple, des militants de BDS ont été poursuivis pour avoir utilisé de la peinture gouache sur un drapeau et d’autres militants ont été accusés de diffamation pour avoir critiqué publiquement des élus locaux ayant manifesté leur soutien à Israël. Le secrétaire de la Libre Pensée a fait l’objet d’une plainte déposée par le préfet, reposant sur des fondements juridiques particulièrement fragiles, laissant ainsi présager une atteinte potentielle à sa liberté d’expression. Cette situation préoccupante n’a pas échappé aux médias, qui s’en sont largement fait l’écho, renforçant ainsi l’inquiétude quant à la dérive autoritaire que semble illustrer cette répression.
M. le député rappelle qu’une décision du Conseil d’État, en date du 18 octobre 2023, a clairement établi que l’interdiction générale et préventive de manifestations pro-palestiniennes ou pro-israéliennes contrevient au droit, chaque situation devant faire l’objet d’une évaluation minutieuse, fondée sur un risque avéré de trouble à l’ordre public. La liberté de manifester, ayant une valeur constitutionnelle, ne peut être entravée de manière systématique et l’interdiction préventive doit demeurer une exception, strictement encadrée par le droit. Il est impératif que l’action des préfets respecte ces principes constitutionnels et qu’au lieu de réprimer des manifestations pacifiques, ils mettent en œuvre les moyens nécessaires pour assurer la sécurité des rassemblements tout en garantissant l’exercice des libertés publiques.
En conséquence, M. le député demande à M. le ministre de désavouer les pratiques de répression systématique adoptées par le préfet du Hérault. Il lui demande également quelles mesures il compte prendre pour rappeler aux préfets que la liberté de manifestation est un principe fondamental et que son interdiction ne doit demeurer qu’une exception strictement encadrée. Enfin, il l’interroge sur les actions qu’il envisage de mettre en place pour répondre aux inquiétudes soulevées par des autorités indépendantes telles que la Défenseure des droits, les experts des Nations unies et les organisations comme Amnesty international, qui dénoncent la restriction croissante des libertés d’expression et de manifestation en France.