Chères Citoyennes, chers Citoyens,
Merci d’être venus ce soir pour cette deuxième édition de fête de la République que nous organisons ici à Noisy-le -Grand.
Je peux déjà vous annoncer que nous ferons la troisième édition l’an prochain à Neuilly-sur-Marne.
Nous ne sommes pas venus ici ce soir commémorer, mais célébrer ! Nous ne sommes pas venus ici nous souvenir, mais nous inspirer !
Au moment où nous célébrons cette fête de la République, Emmanuel Macron a fait le choix de recevoir sous les dorures de Versailles Charles III. Cette réception est tout sauf anecdotique. Elle en dit long sur ce Président qui se rêve en Monarque entouré de courtisans prêts à tout pour dominer le peuple.
Lui, qui se rêve en monarque devrait regarder les livres d’histoire. Le peuple français est tout sauf docile. C’est un peuple révolutionnaire assoiffé d’égalité et de justice sociale.
La France de 2023 prend sous certains aspects des aires de France de 1788. 4 ans avant la proclamation de la République, le pays est endetté. Pour remédier à cette situation, le peuple est écrasé sous des impôts divers et variés, mais certains en sont exemptés comme les nobles et les religieux. La France de 1788, comme le France de 2023, est une société de privilèges pour quelques-uns tandis que le grand nombre souffre.
Comment ne pas faire le parallèle avec cette France de 2023 où 43 % des Français ne peuvent pas consommer de fruits et légumes tous les jours, où 1 étudiant sur 2 a déjà supprimé un repas sur deux, alors que dans le même temps, le nombre de millionnaires a augmenté en 2022 pour placer la France sur la troisème place du podium mondial.
Et après, on va nous demander de faire des excuses à Bernard Arnauld pour avoir dénoncé son don de 10 millions d’euros au Restos du cœur ?
Pour rappel, si Bernard Arnault payait un impôt d’à peine 1 % sur sa fortune totale, cela représenterait un montant de 2 milliards d’euros, soit une somme 200 fois plus élevée que les 10 millions qu’il vient de débourser. Non, nous ne disons pas merci à Bernard Arnault.
Le parallèle avec 1788 ne s’arrête pas là. Dès la fin des années 1780, les mauvaises récoltes jettent à la rue les membres les plus fragiles des communautés. Les conditions climatiques sont épouvantables en 1788 avec une sécheresse au printemps, de violents orages le 13 juillet, provoquant de mauvaises récoltes et la hausse du prix des céréales et du pain. La rudesse de l’hiver qui suit fait grimper le prix du bois de chauffage. Là aussi, cela ne vient pas de nulle part. Ces crises frumentaires sont dues à la libéralisation du commerce des grains sous l’Ancien Régime qui a débuté en 1763.
Cette libéralisation était ardemment souhaitée par ceux que l’on appelle déjà les « économistes », qui en vérité sont des spéculateurs, qui considèrent que la liberté laissée aux négociants et le jeu d’une concurrence désinhibée sont l’unique moyen pour résoudre la lancinante question des subsistances dans la France d’Ancien Régime. Pour eux, déjà, le contrat social implicite selon lequel le roi s’engageait à défendre ses peuples contre la famine en échange de leur soumission n’a désormais pour les libéraux plus lieu d’être. Le marché et la libéralisation comme solution miracle à tous les problèmes.
231 ans après la proclamation de la République, les libéraux n’ont pas changé. Transport, énergie, éducation … Pour eux, seul le marché et la concurrence sauvage sont de natures à apporter des solutions aux problèmes de la vie quotidienne. En réalité, cette solution ne sert qu’à gaver les grandes entreprises sur le dos des gens, détruisant au passage les services publics.
La libéralisation du marché de l’énergie, conduite à marche forcée par l’Union européenne contre l’intérêt des peuples, en est le parfait exemple. En deux ans, le prix de l’énergie a augmenté de 31 %. Les factures à trois, voire quatre chiffres se multiplient prenant à la gorge des millions d’habitants.
Face au marché, nous demandons le retour des tarifs régulés et la mise en place d’un pôle public de l’énergie non soumis aux logiques de marchés. L’énergie, au même titre que l’éducation, la santé, le logement, est un bien commun qui doit être garanti à chaque citoyen.
Mais revenons aux années 1780, car c’est là que se trouvent les germes de la république, de la Révolution et de la commune de Paris. D’avril à mai 1775, la guerre des farines a lieu en France. En 17 jours, 180 conflits ont pu être recensés dans le Bassin parisien.
Pendant près de 4 ans avant la proclamation de la République, et je ne vais pas ici entrer dans les détails, deux légitimités s’affrontent : celle du roi d’un côté et celle des représentants du peuple de l’autre. C’est à cette histoire qu’il nous faut se référer pour comprendre pourquoi le 21 septembre 1792 est si important, et ce qu’il nous a apporté.
Le 21 septembre 1792, la 1re République était proclamée dans notre pays. Ou plutôt, car c’est inexact : la monarchie était abolie et, de fait, on décidait le lendemain de nommer de « l’an I de la République » tous les actes officiels.
Il faut imaginer ce qu’une telle proclamation pouvait représenter à l’époque. Toute l’Europe est gouvernée par des rois. Et voici que le peuple français fait tomber l’une des plus vieilles monarchies d’Europe, qui remonte à l’an 496 et au baptême de Clovis.
Et voici que le peuple français a abattu la monarchie dite « absolue » et « de droit divin ». Un peuple, notre peuple, vient de faire tomber plus de 1000 ans d’un système dans lequel un homme disait détenir un pouvoir illimité de Dieu lui-même. Un peuple vient d’affirmer par cet acte sa liberté absolue : celle de gouverner lui-même son pays, sans aucune tête couronnée au-dessus de lui. C’est un séisme qui fait trembler la terre entière. Plus de 230 ans après, l’histoire de la révolution est toujours controversée. Elle ne cesse de faire l’objet de calomnie, lui attribuant toutes les horreurs possibles, certains allant jusqu’à réhabiliter le roi. Disons les choses clairement, le roi était un traître à la nation qui conspirait contre la patrie pour rétablir ses privilèges ! Déjà, lui et ses amis n’avaient d’autre patrie que leurs privilèges.
Pourquoi célébrer cette date ?
D’abord, car c’est notre héritage. Ensuite pour ne pas oublier que nous sommes le peuple français qui a vaincu 1000 ans de monarchie et proclamé aux yeux du monde que les hommes naissent et demeurent libres et égaux. Enfin, car cette République est en danger.
La République, c’est la rupture pour créer un état nouveau fondé sur la liberté, l’égalité et la fraternité, quel que soit la religion, la couleur de peau, la langue. En République, le peuple est un et indivisible, car il a partout les mêmes droits et la loi s’applique pour toutes et tous, puissants et misérables.
La République n’a pas été faite pour les Français, elle a été faite pour des droits humains, applicables à toute personne humaine. La République française n’est pas occidentale, elle est universaliste. La République n’est pas un régime neutre.
Pourquoi est-elle en danger sous le règne du Monarque Emmanuel Macron ?
D’abord, car nous sommes dans un moment de bascule où la Police Républicaine est en train de disparaître. Alors que nous marcherons samedi, contre les violences policières, le racisme et pour la justice sociale, car personne n’a oublié le meurtre de Nahel, tué à bout portant par un policier.
Personne n’a oublié Adama Traoré, Alouhissen Camara, Cédric Chouviat, Mohamed Bendriss, Ibrahima Bah, Zineb Redouane, morts entre les mains de la police.
Personne n’a oublié les dizaines d’éborgnés, de mutilés après la mobilisation des gilets jaunes, pendant la réforme des retraites ou suite aux révoltes urbaines après la mort de Nahel.
Personne n’a oublié les 15 personnes tuées, en un an et demi, suite à un refus d’obtempérer.
Pourtant, rien ne change, pire les premiers responsables de la police ont apporté leur soutien total à des policiers factieux qui se sont mis en arrêt maladie pour soutenir des collègues qui avaient tabassé et laissé pour mort un jeune homme dans la rue. Je pense évidemment à Hedi, dont les images ont fait le tour du monde. Dans quel pays une police républicaine se comporte de cette manière ? Dans quel pays une police républicaine publie des communiqués de presse pour qualifier les jeunes des quartiers populaires de « nuisibles », tout en appelant à la guerre civile ? Dans quel pays des syndicats policiers demandent une justice d’exception pour des policiers ? Dans quel pays des policiers manifestent aux cris de « le problème de la police, c’est la justice » ? Nous avons raison de demander la refonte de la police de la cave au grenier !
L’article 12 de la déclaration des droits de l’homme est du citoyen de 1789 indique que « La garantie des droits de l’homme et du citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée ».
Aujourd’hui, la police est aux ordres du pouvoir pour faire taire les colères populaires. Nous savons trop bien ici en Seine-Saint-Denis, laboratoire des violences policières, combien cette police s’inscrit en dehors du champ républicain quand elle passe à tabac des jeunes, quand elle les contrôle 10 à 15 fois par jour, en raison de leur couleur de peau.
Combien d’exemples avons-nous autour de nous, de mamans qui ont peur le soir pour leurs enfants quand ils sont dehors ? Combien de personnes disent ne plus venir en manifestation car elles ont peur ?
Est-ce normal de craindre pour sa vie en présence de la police ? Non.
Non, nous ne détestons pas la police. Nous détestons celles et ceux qui se comportent comme des violents, des racistes, qui mettent à mal le lien de confiance entre la police et la population. Certains se scandalisent de voir dans les manifestations le slogan « tout le monde déteste la police ». Dire que nous le comprenons, ce n’est pas dire que nous le partageons. Mais ces mêmes personnes, qui depuis leurs plateaux télés et leurs sièges confortables dans leurs beaux quartiers poussent des cris d’orfraies, combien ont-elles vécu de contrôle de police dans leur vie ? Combien de fois ont-elles été victimes de racisme de la part de la police ou de tout autres institutions ?
Notre rôle de responsable politique, c’est de trouver des solutions politiques à cette situation. Oui la police tue, c’est un fait. Oui l’institution policière est en proie à un racisme systémique. Oui l’IGPN couvre les policiers violents.
Aussi, nous continuerons à porter nos propositions (indépendance de l’IGPN, abrogation de la loi Cazeneuve de 2017, dissolution de la bac, retour d’une police de proximité, etc.) pour mettre fin à cette situation et refaire de la police, une véritable police Républicaine.
Éducation
Parce que nous nous trouvons encore dans l’engrenage d’une rentrée scolaire rythmée par les difficultés, une rentrée qui détonne largement avec les discours d’autocongratulation de Gabriel Attal et des macronistes, je dois dire quelques mots du droit à l’éducation.
Trop occupé à faire avancer son agenda raciste, Gabriel Attal, dans la droite ligne des précédents ministres, ne s’est pas préoccupé des vrais sujets qui préoccupent l’école : le manque de professeurs et d’infirmier scolaire, un matériel informatique désuet ou non fonctionnel, ou encore des classes surchargées et surchauffées.
La France a parcouru un long chemin pour devenir Laïque et en France, l’école de la république est laïque. Aristide Briand, rapporteur de la loi de 1905, a été clair : « Pour l’État, il n’y a pas de vêtement religieux ou non-religieux ».
Plus d’un siècle plus tard, on a oublié le plus fondamental : la loi de 1905 était avant tout une loi de liberté.
Désormais, on instrumentalise la laïcité à des fins islamophobes et on montre du doigt et stigmatise des jeunes femmes musulmanes.
En 1798, les rédacteurs de notre déclaration des droits de l’homme et des citoyens ont voulu inscrire dans le marbre les mots suivants : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme ».
Restons dans l’esprit des révolutionnaires de 1789, du côté de la liberté de conscience, du droit à l’éducation et de l’intérêt supérieur de nos enfants.
Immigration
Enfin, et je vais terminer là-dessus, c’est sans doute une leçon pour le présent, au moment où la loi immigration arrive dans le débat.
Voici ce que dit la Constitution de la 1re République à son article 4 concernant l’accès à la citoyenneté : « Tout homme né et domicilié en France, âgé de vingt et un ans accomplis ; – Tout étranger âgé de vingt et un ans accomplis, qui, domicilié en France depuis une année – Y vit de son travail – Ou acquiert une propriété – Ou épouse une Française – Ou adopte un enfant – Ou nourrit un vieillard ; – Tout étranger enfin, qui sera jugé par le Corps législatif avoir bien mérité de l’humanité – Est admis à l’exercice des Droits de citoyen français ».
On le voit, le lieu de naissance n’est pas le sujet pour la République. Ce qui compte, c’est la volonté de vouloir faire partie de la Nation. Il n’est ni question de religion, ni question de couleur de peau.
La République, celle dont on parle depuis tout à l’heure est une République démocratique, sociale et, surtout, antiraciste.
Et c’est pourquoi ceux qui l’ont utilisé pendant la colonisation pour justifier les pires horreurs, et qui l’utilisent aujourd’hui pour refuser l’accueil aux plus fragiles, en ont trahi le sens et les valeurs.
Depuis l’arrivée récente d’exilés sur l’Ile de Lampedusa, la droite et l’extrême droite agitent tous leurs fantasmes racistes.
Non, il n’y a ni appel d’air, ni submersion migratoire, ni grand remplacement. La France est l’un des pays où l’immigration est la plus faible en Europe de l’Ouest et consacre moins de 1 % de son budget à des programmes spécifiques pour l’immigration.
La France, avec la complicité de l’Union européenne, mène une politique sécuritaire qui se traduit par des constructions de murs entre les pays, la militarisation des frontières et des violations graves des droits humains. Elle sous-traite la gestion des migrants à des régimes autoritaires, augmentant la répression et la chasse aux exilés. Dernier en date : le protocole d’accord signé en juillet dernier avec la Tunisie, pays où ont pourtant été dénoncées de multiples violations des droits des migrants.
Le bilan est catastrophique : la Méditerranée est devenue le plus grand cimetière à ciel ouvert avec 50 000 personnes mortes ou disparues depuis 20 ans. La désorganisation des États de l’Europe forteresse a fait la preuve de ses limites et de son inhumanité.
Lorsque certains instrumentalisent des questions identitaires, pendant que d’autres regardent la situation avec indifférence, notre rôle est de rappeler à l’ordre les responsables de cette situation : le capitalisme et l’impérialisme.
Les responsables sont ceux qui exploitent les ressources naturelles de l’Afrique, des gens comme Bolloré, qui a fait sa fortune, pendant plus de 35 ans, sur l’exploitation forestière et le commerce des bois tropicaux africains.
Les responsables sont ceux qui mènent des politiques capitalistes et impérialistes qui causent des vagues de migrations vers l’Europe, forçant des milliers de personnes à risquer leur vie pour échapper aux guerres, à la crise climatique et à la misère.
Le sujet de l’immigration est donc d’autant plus important qu’il se trouve au croisement de plusieurs luttes : celle de l’antiracisme, contre le capitalisme, l’impérialisme et l’extrême droite.
À l’heure où les politiques entendent encore s’en prendre aux droits des migrants, nous devons rester fidèles à l’histoire de la France et nous engager pour le respect des droits fondamentaux des exilés.
Célébrer, c’est préparer de grands événements.
Alors que dans toute l’Europe, les forces d’extrême-droite et de droite se coalisent contre la liberté et la démocratie, nous sommes le dernier rempart pour faire vivre la République.
L’heure appelle les caractères.
L’heure appelle à la résistance populaire.
Vive la France ! Vive la Révolution ! Et, surtout, vive la République !